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Homélie

Homélie : saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ

Homélie pour le 14 juin 2020

Saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ

 

 

Dans le prolongement du temps Pascal, l’Eglise célèbre quelques autres grands mystères de la foi chrétienne. Ce fut la fête de la Trinité Dimanche dernier. C’est celle du Saint Sacrement du Corps et du Sang du Christ aujourd’hui. L’Eucharistie est un grand mystère. Mais qu’y vivons-nous ? Qu’est-ce que le Seigneur nous y fait vivre ?

 

Tout d’abord, dans l'Eucharistie le Christ se rend présent et se donne dans le pain. C'est dire la valeur d'une réalité toute simple comme le pain. Le Christ se sert de cette réalité de notre vie quotidienne pour offrir son corps, sa vie. Il demande qu'on lui offre le pain pour qu'il le transforme. Pour nourrir et rassasier une grande foule, il s'est servi des cinq pains et des deux poissons qu'un enfant lui a remis. C'est peu cinq pains et deux poissons. Mais c'est nécessaire pour que Jésus nourrisse la foule. C'est le sens de l'offertoire lors de la messe. Le Seigneur part de ce que nous lui offrons. Dans les camps de concentration, le moindre morceau de pain était précieux pour que les prisonniers se nourrissent. Là où il y avait des prêtres, certains morceaux étaient gardés pour célébrer l’Eucharistie, en cachette. Cette offrande avait une valeur infinie.

Le Pain eucharistique, corps du Christ, nous rappelle la valeur du pain de chaque jour. Il nous rappelle la valeur du travail des hommes pour se procurer le pain quotidien, la valeur de la terre qui nous donne le pain, la valeur des petites gens qui peinent, qui souffrent, pour gagner leur pain. Tout est lié nous dit le pape François dans son encyclique Laudato’ Si. L’homme est lié à la terre. La terre est liée à l’eau et à l’air qui sont fragiles. La terre est liée au travail de l’homme qui peut lui faire produire de bonnes choses. Les hommes sont liés entre eux. En contemplant le Christ présent dans l’Eucharistie, nous sommes invités à contempler la réalité de notre monde dans ce qu'il a de plus quotidien : la terre, la nature, le travail humain, les pauvres… Tout cela a une valeur infinie aux yeux de Dieu. Et c’est cela que nous devons lui offrir.

L’autosuffisance et l’abondance nous font peut-être oublier le prix de ce qui est petit, fragile, charnel, quotidien. La pandémie nous a obligé à ralentir et à savourer le moment présent et les réalités simples de la vie. Ce que le Christ a assumé de notre réalité terrestre, nous devons le contempler et le respecter. Nous devons le lui offrir pour qu'il le transforme.

 

D’autre part, lors de la messe, la parole de Jésus transforme le pain pour qu'il devienne le Pain eucharistique, l'offrande de sa vie. Elles sont importantes ces paroles. Sans elles, il n'y a pas de nouveauté eucharistique. En prenant le pain Jésus dit : « Ceci est mon corps livré pour vous ». En offrant le vin il dit : « Ceci est mon sang versé pour vous ».  Et dans l'Evangile qu'on vient d'entendre il dit : « Je suis le pain vivant. Ce pain, c'est ma chair donnée pour la vie du monde ».

Nous devons être attentifs aux paroles de Jésus, pas seulement celles de la dernière Cène où il institue l'Eucharistie. Nous devons être attentifs à tout ce qu'a dit Jésus et finalement au message de l'ensemble de sa vie. Car c'est cela qui donne une orientation nouvelle au pain que nous lui offrons et, au-delà, à notre monde et à notre histoire humaine que nous lui présentons. Nous devons méditer l'enseignement du Seigneur. Certains passages des évangiles disent que Jésus guérit, pardonne, relève. D'autres invitent à ce que nous nous engagions. L’appel à prendre notre croix nous sollicite. Mais nous ne devons pas retenir que les passages qui nous plaisent. C’est tout le mystère du Christ qu’il faut accueillir.

Dans la messe, la liturgie eucharistique est inséparable de la liturgie de la Parole. La lecture et l'écoute de la Parole de Dieu donne sens à l’Eucharistie. Et cette parole est surtout un appel à la confiance. Dieu dit, qu’en Jésus, il nous offre son amour et son pardon auxquels nous sommes invités à répondre en retour par le don de notre confiance et par l'ouverture de notre cœur aux autres. Voilà la Parole qui nous est adressée, celle qui transforme non seulement le pain en corps et vie de Jésus mais surtout nos vies en offrandes agréables à Dieu. C'est cela que nous devons accueillir dans chaque Eucharistie.

 

Enfin, l'Eucharistie anticipe le banquet céleste. Lors de l’Eucharistie, nous contemplons la personne de Jésus qui se donne, mais pas seulement. Jésus est inséparable du Père et de l’Esprit. Il est inséparable aussi des saints et de son corps qui est l’Eglise et à qui il s’offre. Seul Jésus a souffert sur la croix. Mais il l’a fait dans l’obéissance au Père, dans la force de l’Esprit saint, pour le salut des hommes auxquels il partage sa vie et sa gloire. L’Eucharistie nous fait vivre déjà, quoique de manière imparfaite, le banquet céleste où sont réunis les trois Personnes divines avec les membres de la famille humaine qui partagent son amour, en premier lieu la Vierge Marie bien sûr. En filigrane de l’Eucharistie, nous contemplons la Jérusalem Céleste qui réunit les hommes avec le Seigneur et où il n’y a plus de division ni de mort mais la joie et la paix sans fin.

D’une certaine façon, c’est ce que représente l’icône de la Trinité de Roublev que vous connaissez sûrement. Dans cette icône, trois personnages sont assis autour d’une table sur laquelle est posé une coupe dans laquelle il y a un animal, peut-être un agneau. On pense bien sûr à l’Agneau Pascal, l’Agneau du sacrifice, le sacrifice de Jésus. Le quatrième côté de la table est vide et cela suggère l’invitation qui est faite à celui qui regarde l’icône de venir s’assoir à la table pour partager le repas. Cette icône est interprétée comme la représentation de la Trinité qui invite toute l’humanité au repas pascal qu’elle offre. En quelque sorte, elle figure ce que nous célébrons dans chacune de nos Eucharisties.

Il est bon dans nos Eucharisties, d’être attentif à l’accueil, au rassemblement des fidèles du Seigneur dans leur grande diversité. Il est bon de soigner la communion et l’unité de nos assemblées dans l’esprit fraternel que Jésus nous offre. C’est cela l’Eucharistie.

 

Oui, elle est belle la fête du Saint sacrement du Corps et du Sang du Christ. Elle nous rappelle la grâce, la puissance d’amour et de vie contenue dans chacune de nos Eucharisties, aussi modestes soient elles en apparence. Que le Seigneur nous aide à les vivre toujours plus intensément et joyeusement. Amen.